Marcel Thil, le puncheur aux poings de fer
03/02/2020

Il n'est pas souvent cité parce que resté beaucoup moins célèbre et médiatique que Marcel Cerdan, le « Bombardier Marocain » amant d'Édith Piaf, un autre Marcel a pourtant été un grand champion de boxe français d'envergure mondiale. Dans les années 1930, Marcel Thil a conquis le titre de champion du monde poids moyens pour le conserver pendant 5 ans. Un boxeur de légende de l’Entre-deux-guerres inscrit à l'International Boxing Hall of Fame.

Originaire de Saint-Dizier en Champagne, Marcel Thil grandit à la dure dans les paysages industriels de l'Est sidérurgique et quitte l'école prématurément pour exécuter divers petits boulots avant de découvrir la boxe au contact de soldats de l'Oncle Sam durant la Première Guerre mondiale. Il n'a pas vingt ans quand il commence ensuite à s'entraîner en club à Reims et participe à son premier combat au début des années 1920. Puis il s'engage dans la marine nationale à Cherbourg et rencontre à l'occasion des championnats de France de la Marine à Lorient en 1923 Jean Gabin qui y effectue son service militaire chez les fusiliers marins. Les deux hommes deviendront amis et Gabin un grand amateur de boxe. Élogieux à son sujet, l'acteur français déclarera en 1932 dans Match L'Intran :

Je n'en vois guère qu'un, Marcel Thil, pour rappeler le type des champions d'avant-guerre. Je ne pense pas qu'on retrouve jamais d'hommes du genre de ceux qui boxaient alors.

Petit gabarit d'1m73, blond dégarni aux yeux bleus et au nez écrasé qui témoigne des coups encaissés pendant près de 20 ans de carrière, Thil a le physique trapu du forgeron, le tempérament du calme qui cache un tigre prêt à bondir, et la cuirasse épaisse du navire de guerre prêt à affronter la tempête. 

marcel thilNez écrasé, arcades enflées, le profil type du boxeur.

Ses débuts chez les professionnels sont laborieux, avec plusieurs défaites qui ne le découragent pas pour autant avant un déclic en 1928. Champion d'Europe, il combat pour le titre mondial des poids moyens à Paris contre l'américain William « Gorilla » Jones, au Parc des Princes le 11 juin 1932 et s'en empare pour ne plus le lâcher pendant plus de 5 ans. À l'époque, comme le dira un jour Gabin, Paris est la capitale internationale de la boxe et ce qui se fait de mieux dans le monde pugilistique s'y produit. Ni des boxeurs vedettes de l'époque comme le Cubain Kid Tunero, le Québécois Lou Brouillard, le Britannique Len Harvey ou l'Américain Vince Dundee ne parviendront à vaincre Marcel Thil avant que Fred Apostolli ne le dépossède de sa couronne le 23 septembre 1937 à New York. Une défaite qui met fin à une exceptionnelle carrière qui comptabilise 113 victoires dont 54 par KO pour 148 combats, 13 nuls et 22 défaites. Entre temps, le boxeur marnais aux poings de fer aura aussi été champion d'Europe des mi-lourds entre 1934 et 1935 en battant le redoutable Jock McAvoy. Après une retraite en tant qu'entraîneur, comme Jack Johnson - signe que les plus grands ont en commun une fureur de vivre qui les mène à constament flirter avec le danger - il périra dans un accident de voiture à Cannes en 1968.

Marcel Thil face à Lou Brouillard le 20 janvier 1937 au Palais des Sports à Paris.